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Cinq ans de gardiennage des rizières : une réussite pour la cohabitation entre humains et lémuriens

C’est en 2019 que nous avons initié le projet pilote de gardiennage des rizières, dans un contexte de tensions croissantes entre les agriculteurs et les grands hapalémurs. Ces derniers, bien que ne consommant du riz qu’exceptionnellement — moins de 1 % de leur régime alimentaire —, pouvaient causer des dégâts considérables, détruisant parfois jusqu’à 80 % d’une récolte. Ces incursions mettaient en péril à la fois la sécurité alimentaire des communautés locales et la pérennité des efforts de conservation engagés.

Un système simple, adapté et durable

Le principe du gardiennage est aussi simple que pragmatique : des gardiens se relaient jour et nuit pour surveiller les rizières pendant les deux campagnes annuelles de culture du riz :

Comme les paysans ne commencent pas tous leurs cultures au même moment, la surveillance est assurée de manière continue pendant environ six mois.

Le dispositif est complété par :
– Des opérations de défrichement autour des rizières, qui améliorent la visibilité et facilitent la surveillance par les gardiens ;

– La construction de passerelles aux points de passage habituels des grands hapalémurs, permettant à ces derniers de traverser sans endommager les cultures et aux gardiens d’intervenir sans risquer de séparer les individus d’un même groupe.

Des grands hapalémurs utilisant une passerelle © Helpsimus

Aujourd’hui, 168 gardiens sont mobilisés, encadrés par un agent d’IMPACT Madagascar.

Surveillance des rizières © IMPACT Madagascar

Des résultats concrets et mesurables

Les données collectées depuis 2022 montrent l’impact direct et positif du dispositif :

PériodeTentatives d’intrusionsIntrusions réussiesRepoussées sans dégâtsAvec dégâts% dégâts
Avril–Juin 2022417417 (dégâts < 1 %)0
Nov. 2022 – Fév. 20231116122115 (dégâts < 1 %)71 à 5 %
Avril–Juin 202310814030 (dégâts < 0.1 %)100.5 à 2 %
Nov. 2023 – Fév. 20249001818 (dégâts < 1 %)0
Avril–Juin 202414069592 (dégâts < 0.01 %)31 à 2 %
Nov. 2024 – Fév. 2025424963< 1 %

Depuis 2022, plus de 5 000 tentatives d’intrusion ont été recensées. La très grande majorité a été repoussée avec succès, sans aucun dommage pour les cultures. Seuls quelques incidents isolés ont occasionné des pertes mineures.

Une cohabitation durablement rétablie

Grâce à ce dispositif, les conflits entre agriculteurs et lémuriens ont disparu. Les cultures sont désormais protégées, et la simple présence des gardiens suffit à dissuader les incursions. Dans un contexte de rendements agricoles en baisse à cause du changement climatique, cette sécurisation des récoltes est d’autant plus précieuse.

Le système bénéficie aujourd’hui du soutien des communautés locales, signe de son efficacité et de sa bonne appropriation sur le terrain.

Ce projet représente un exemple concret de cohabitation réussie entre l’humain et la faune sauvage — une réussite rendue possible grâce à l’engagement constant de nos partenaires.

Partenaires du gardiennage des rizières : Cotswold Wildlife Park, Palmyre Conservation, Fondation Audemars-Piguet pour les Arbres, Fondation Le PAL Nature, AFdPZ, Pure Trade, Sainte-Croix Biodiversité, Parc de Clères, SaveOurSpecies IUCN, Comité français de l’UICN – ProBioDev, Univet Nature, Boissière-Mervent Conservation, Conservatoire pour la Protection des Primates, Parc animalier de la Barben

Rapport annuel 2024

Rapport annuel 2023

Retrouvez le rapport annuel des activités de Helpsimus pour l’année 2023 !

Soutenir les écoles : une priorité au sein de notre programme de conservation

Nous soutenons 5 écoles primaires publiques depuis le lancement du programme Bamboo lemur en 2008 : Sahofika, Vohitrarivo, Ambodigoavy, Ambodimanaga et Ambohipo localisées dans les 5 fokontany impliqués dans le programme.

Ce sont d’abord les parents d’élèves et les enseignants qui ont sollicité notre aide. En effet, au moment de la mise en place de nos premières actions pour la protection des grands hapalémurs, trois des écoles étaient en ruine et les deux autres étaient en très mauvais état.

Ecole d’Ambohipo – 2016 © D. Roullet
Ecole d’Ambohipo – 2016 © D. Roullet
Ecole de Vohitrarivo – 2019 © Helpsimus

Nous avons alors débuté notre soutien par la construction de nouvelles infrastructures, finançant au total 12 bâtiments scolaires, les deux premiers étant en bois. À partir de 2017, tous les nouveaux bâtiments ont été construits avec des matériaux durables, afin que chaque école dispose de trois bâtiments en dur offrant plus de confort et résistant mieux aux cyclones. Deux écoles sont aujourd’hui terminées, il s’agit de celles de Sahofika et de Vohitrarivo, cette dernière ayant été totalement reconstruite.

Ecole de Vohitrarivo – 1ere bâtiment – 2021 © Helpsimus
Ecole de Vohitrarivo – 2022 © D. Roullet
Ecole de Sahofika – 2024 © S. Meys

Chaque nouveau bâtiment scolaire est divisé en 2 salles de classe, toutes entièrement équipées : tables et bancs pour les écoliers, bureau et chaise pour l’enseignant, armoires de rangement, tableau noir, etc.

Ambohipo © D. Roullet
Classe de maternelle – Sahofika © S. Meys

De plus, 3 bâtiments existants ont été rénovés : l’un à Sahofika et les 2 autres à Ambodigoavy.

Plusieurs salles de classe ont également été décorées de fresques murales représentant les lémuriens et leur habitat.

© Helpsimus

Nous avons également construit des latrines avec des stations de lavage des mains. En complément de ces installations, nous organisons des ateliers de sensibilisation à une meilleure hygiène pendant lesquels nous enseignons aux élèves l’importance de se laver les mains et de maintenir une bonne hygiène corporelle.

© S. Meys
Atelier lavage des mains – Ambodimanga © Helpsimus

Outre la construction et la rénovation des infrastructures scolaires, nous prenons aussi en charge la moitié du salaire des 16 enseignants non titulaires recrutés par les parents d’élèves, dont 7 sont affectés aux classes préscolaires. En effet, nous avons soutenu l’ouverture de classes maternelles dans 3 écoles. Depuis l’année dernière, nous proposons également des formations aux enseignants, dont la plupart n’ont pas de diplôme professionnel.

De plus, nous distribuons chaque année les fournitures aux enfants scolarisés qui sont près de 700 actuellement.

© D. Roullet

En 2016, nous avons ouvert notre première cantine scolaire à l’école de Sahofika. Aujourd’hui, chacune des 5 écoles dispose de sa propre cantine. Nous avons construit et équipé les infrastructures nécessaires (cuisines, réfectoires) et nous assurons la gestion et le financement complets de ces cantines.

Cuisine scolaire de Vohitrarivo © S. Meys
Cuisine de Sahofika © S. Meys

Depuis les cyclones de 2022, les 5 cantines sont ouvertes toute l’année scolaire. Auparavant, elles étaient opérationnelles uniquement pendant la période de soudure (la période entre les 2 récoltes de riz).

Sur l’ensemble de l’année scolaire 2022-2023, elles ont distribué près de 90 000 repas bénéficiant à 719 élèves, 23 enseignants et 14 cuisinières par jour.

Sahofika © S. Meys
Vohitrarivo © S. Meys

Les cantines scolaires favorisent l’assiduité des enfants à l’école, ce qui contribue à améliorer significativement leurs résultats. Ainsi, en 2023, dans les 5 écoles primaires soutenues par Helpsimus, plus de 70 % des candidats au Certificat d’étude primaire élémentaire (CEPE) ont réussi leur examen avec succès. Cela n’était jamais arrivé auparavant ! L’élève ayant obtenu les meilleurs résultats de la Commune est originaire de l’école de Vohitrarivo.

Mme Razafinampenarivo, la cheffe de la Zone d’Administration Pédagogique (ZAP) de Tsaratanana a d’ailleurs exprimé sa gratitude pour notre soutien.

Les cantines scolaires constituent également une source d’emploi pour plus d’une centaine de cuisinières qui travaillent en alternance pour préparer les repas.

Nous cherchons également à mettre en place des circuits courts d’approvisionnement des cantines grâce aux agriculteurs participant à notre programme agricole.

Ainsi, l’objectif de ce programme de cantines scolaires est double :

– assurer la présence des enfants à l’école ;

– développer l’économie locale autour de la gestion des cantines scolaires. 

Grâce à un partenariat avec Electriciens Sans Frontières, les 5 écoles ont été électrifiées permettant aux enseignants de prolonger leurs activités et d’organiser des sessions de soutien scolaire si besoin.

Ambohipo © D. Roullet

Soutenir l’éducation des enfants est essentiel. En leur offrant une solide éducation de base, nous les aidons à sortir du cercle vicieux de la pauvreté pour entrer dans celui, vertueux, du développement durable. Une fois adultes, ils seront mieux préparés pour gérer leurs ressources naturelles de façon pérenne et protéger leur remarquable biodiversité.

La population de grands hapalémurs protégée par Helpsimus a quasiment triplé en 10 ans !

Le programme Bamboo Lemur a été initié en 2008 après de la découverte de deux groupes de grands hapalémurs (Groupes 1 et 2), comprenant chacun une vingtaine d’individus à l’époque.

Grand hapalémur © S. Meys

Entre 2008 et 2014, la croissance de la population résulte non seulement de la mise en œuvre des premières mesures de protection, mais également de la découverte de cinq nouveaux groupes.

À partir de 2014, année marquée par l’arrêt des prospections, l’augmentation de la population est exclusivement attribuable aux mesures de protection en place.

Elle est d’ailleurs constante depuis cette date, à l’exception de 2022 où une cinquantaine d’individus n’ont pas été retrouvés à la suite du passage de deux cyclones de forte intensité.

Depuis 2018, le nombre de naissances se situe généralement autour de 70 par an, avec des pics dépassant occasionnellement les 80. Ces chiffres sont exceptionnels, surtout si l’on considère que cette espèce était au bord de l’extinction il y a une quinzaine d’années.

© D. Roullet – Helpsimus

Les Groupes 1 et 2 se distinguent par une croissance exceptionnelle, alors même qu’ils vivent dans la partie de notre zone de conservation la plus impactée par l’activité humaine. Cet endroit, bien que fortement anthropisé, présente une abondance de bambous qui constitue la principale source alimentaire des grands hapalémurs. De plus, le Groupe 2 s’est révélé être le plus prolifique au sein de la population. Il a dépassé occasionnellement les 80 individus, avec des records de naissances (jusqu’à 15 bébés répertoriés en 2018).

Ces 2 groupes ont également subi plusieurs fissions, conduisant à la formation des Groupes 3, 1’ et 1’’ pour le Groupe 1, et des Groupes 2′, 2’’ et 4 pour le groupe 2. Par la suite, les Groupes 1’’ et 4 ont également connu une division, donnant ainsi naissance aux Groupes 1’’’ et 4’.

Les fissions au sein des groupes ont eu diverses origines. Certaines fissions ont été directement liées à des actions humaines, notamment des défrichements importants sur le territoire des lémuriens, ainsi qu’à des chasses aux tenrecs effectuées par les villageois avec l’aide de chiens. D’autres ont été d’origine naturelle, se produisant lorsque les groupes atteignaient une taille dépassant généralement les 60 à 80 individus. Enfin, certaines fissions ont été la conséquence de facteurs climatiques intenses, notamment les deux cyclones survenus en 2022. Ces cyclones ont causé des dommages considérables, détruisant jusqu’à 40 % des forêts de bambou. Cette destruction a eu pour conséquence une diminution significative des ressources alimentaires des grands hapalémurs, entraînant ainsi la dispersion des animaux.

Défrichements © S. Meys

La population de grands hapalémurs directement protégée par Helpsimus vient aujourd’hui de dépasser les 650 individus, répartis au sein de 21 groupes. La taille de ces groupes varie, allant d’un peu moins de 30 à près de 80 individus.

Les 21 groupes sont suivis par une équipe de 30 guides locaux qui ont pour missions :

-de suivre les groupes : localiser les animaux et délimiter leur territoire en utilisant des GPS, effectuer des comptages réguliers pour mettre à jour les inventaires, signaler les menaces telles que la présence de chiens ou de pièges, et rendre compte des attaques des grands hapalémurs dans les cultures.

-de repousser les grands hapalémurs hors des zones de culture.

-d’accompagner les équipes scientifiques.

-de participer aux inventaires et au programme d’éducation environnementale.

Guide Helpsimus © S.Meys
Guide Helpsimus © S. Meys

    En plus des 21 groupes régulièrement suivis, trois nouveaux groupes formés après les cyclones de 2022 et nommés 8′, 8″ et 10, ne font pas l’objet d’un suivi régulier. Ensemble, ces groupes totalisent une trentaine d’individus.

    Le site du programme Bamboo Lemur abrite aujourd’hui la plus grande population sauvage de grands hapalémurs. Ce succès est attribuable à notre approche holistique de la conservation qui vise à combattre la pauvreté au sein des populations locales, les rendant ainsi capables de protéger leur biodiversité de manière durable. Le grand hapalémur est actuellement la seule espèce de lémurien dont les populations sont en augmentation. Partant de moins de 100 spécimens en 2008, il est probable que la population dépasse maintenant les 1500 individus à Madagascar. Cependant, malgré cette croissance, l’équilibre demeure fragile, comme démontré en 2022 avec les cyclones. La population de grand hapalémur a néanmoins montré une résilience remarquable face à ces événements, en partie grâce aux mesures mises en place pour limiter les pressions sur son habitat.